Bonnes pratiques de pharmacovigilance – version de mai 2022

L’ANSM a publié, le 02/06/2022, une nouvelle version des Bonnes pratiques de pharmacovigilance.

Cette version fait suite au renforcement du système de pharmacovigilance tant au niveau national qu’au niveau européen et adapte l’exercice de la pharmacovigilance au niveau national.


Pour rappel, la pharmacovigilance :

  • est la surveillance, l’évaluation, la prévention et la gestion du risque d’effet indésirable résultant de l’utilisation des médicaments.

En France, la pharmacovigilance est coordonnée par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).


Pharmacovigilance, objectifs :

  • prévenir le risque de survenue d’effet indésirable résultant de l’utilisation des médicaments dans le cadre de leur autorisation/enregistrement ou hors de ce cadre ou bien lors d’une exposition professionnelle ;
  • promouvoir la sécurité et l’efficacité d’emploi des médicaments.


Bonnes pratiques de pharmacovigilance, objectifs :

  • guider l’ensemble des acteurs et parties prenantes du système de pharmacovigilance (professionnels de santé, patients et associations agréées de patients, Centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV), entreprises pharmaceutiques) en détaillant le rôle de chacun dans ce système.


Cette nouvelle version intègre

👉 les évolutions résultantes de la réforme de l’accès dérogatoire des médicaments

👉 les nouvelles modalités de déclaration et de traitement des signalements d’erreurs médicamenteuses sans effet indésirable liée à un médicament et

👉 des précisions sur le rôle des titulaires d’autorisation de mise sur le marché (MAH) et des exploitants.


✨ La pharmacovigilance s’exerce pour les médicaments bénéficiant :

  • d’une autorisation de mise sur le marché (AMM)
  • d’un enregistrement
  • d’une autorisation d’accès précoce (AAP)
  • d’une autorisation d’accès compassionnel (AAC) ou faisant l’objet
  • d’un cadre de prescription compassionnelle (CPC)


✨ Titulaires et exploitants d’autorisation de mise sur le marché (AMM)

  • L’identité et la qualité ainsi que les coordonnées de la personne de référence en matière de pharmacovigilance (RPV) et de la personne qualifiée responsable en matière de pharmacovigilance dans l’EEE (QPPV) doivent être communiquées dès leur nomination au Directeur général de l’ANSM via la plateforme « démarche simplifiée ».


  • Le RPV s’assure de la mise à jour régulière de l’information sur les médicaments ou produits au regard des données de pharmacovigilance recueillies, et évaluées et des connaissances scientifiques actuelles.


L’exploitant doit :

  • S’assurer que les coordonnées du QPPV sont communiquées par le MAH à l’Agence européenne des médicaments (EMA) par l’intermédiaire de la base de données « Article 57 ».
  •  Evaluer l’efficacité des mesures de réduction de risque mises en place pour ses produits, pour les risques importants identifiés ou potentiels ou qui sont fixées comme condition de l’AMM. Les résultats de cette évaluation sont à reporter dans les PSUR et le PGR afin de discuter de manière périodique l’efficacité ou les limites des mesures mises en place et proposer des alternatives ou des améliorations, le cas échéant.
  • Chercher à documenter médicalement la déclaration transmise directement par un patient ou un usager, si possible auprès du professionnel de santé qui a été consulté par le patient après avoir obtenu l’accord de celui-ci, ou directement auprès du patient lui-même.
  • Recontacter le déclarant des effets indésirables et des situations particulières par tous moyens et dans des délais appropriés, de manière à recueillir ou compléter la déclaration.
  • Adapter sa méthodologie de documentation des cas de pharmacovigilance afin d’optimiser la collecte des données manquantes.


L’exploitant et/ou le MAH doivent :

  • prendre en compte dans le cadre du suivi de la sécurité d’emploi et de l’évaluation du rapport bénéfice/risque tout signalement d’erreur ou de risque d’erreur médicamenteuse. Les erreurs médicamenteuses avérées ayant entraîné ou non un effet indésirable sont évaluées dans le rapport périodique actualisé de sécurité.


  • Déclarer à l’ANSM (pharmacovigilance@ansm.sante.fr) et à l’EMA (P-PV-emerging-safety-issue@ema.europa.eu), s’il s’agit d’un médicament autorisé dans plusieurs États de l’Union européenne, dès que possible et au plus tard dans les 3 jours ouvrables après validation, tout signal urgent de sécurité (Emerging safety Issue) pouvant entraîner une modification du rapport entre les bénéfices et les risques d’une spécialité et nécessitant une communication urgente auprès des patients et des professionnels de la santé.


✨ Déclaration d’effets indésirables et situations particulières

Les professionnels de santé :

  • sont encouragés à déclarer au CRPV toute erreur médicamenteuse sans effet indésirable, qu’elle soit avérée ou interceptée, en précisant la relation avec le médicament impliqué ainsi que tout risque d’erreur.
  • Certains professionnels de santé (médecin, pharmacien, chirurgien-dentiste ou sage-femme) ont l’obligation et d’autres ont la possibilité de déclarer immédiatement les cas graves de pharmacodépendance, d’abus ou d’usage détourné d’une substance, plante, médicament ou autre produit mentionné à l'article R. 5132-981 dont ils ont connaissance, au CEIP-A dont ils dépendent géographiquement.


  • Même en l’absence d’effet indésirable, peut être déclaré directement à l’ANSM tout défaut de qualité d’un médicament, susceptible d’avoir des conséquences pour la santé ou la sécurité des patients.


  • Tout effet indésirable suspecté d’être dû à un APSI est déclaré selon les modalités de l’article R.5121-174 du CSP, sauf si déjà déclaré par voie électronique à la base de données européenne « EudraVigilance ».


Les patients peuvent déclarer :

  • les cas d’abus, de dépendance ou d’usage détourné liés à la prise de médicaments au centre d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance (CEIP-A) dont ils dépendent géographiquement.
  • les effets indésirables résultant d’un usage détourné et aussi toute erreur médicamenteuse sans effet indésirable, qu’elle soit avérée ou interceptée en précisant la relation avec le médicament impliqué ainsi que tout risque d’erreur identifié, au CRPV dont il dépendent géographiquement.


✨ Description détaillée du système de pharmacovigilance

Ce document doit inclure :

  • la liste des contrats conclus entre exploitants et/ou MAH, en détaillant les responsabilités, rôles et modalités de fonctionnement entre l’exploitant et le ou les titulaires d’AMM, les spécialités concernées et les dates des audits de ces organismes réalisés sur les cinq dernières années.
  • la liste des contrats de sous-traitance concernant une ou plusieurs activités de pharmacovigilance le cas échéant, en indiquant les dates des audits de ces organismes réalisés sur les cinq dernières années.

 

✨ Communication sur la sécurité d'emploi des médicaments

  • Lorsque le titulaire d’AMM ou l’exploitant souhaite diffuser une information de pharmacovigilance, transmet à l’ANSM au préalable ses projets de communication. L’ANSM se réserve le droit de faire modifier le contenu et ou le calendrier.


✨ Système de management de la qualité

  • Tous les éléments, exigences et dispositions adoptés pour le système qualité doivent être documentés de manière structurée au travers notamment de la politique qualité, de manuel(s) qualité le cas échéant, de procédures écrites et d’enregistrements.


  • Les indicateurs et opérations de contrôle qualité mis en place pour vérifier la bonne exécution des activités de pharmacovigilance doivent être documentés et archivés et toute non-conformité ou déviation identifiée doit faire l’objet d’une gestion.


✨ Les CRPV

Les informations sur les médicaments pouvant entrainer un risque potentiel ou avéré chez le patient sont communiquées au CRPV par :

  • les professionnels de santé
  • les établissements de santé
  • les correspondants locaux des autres vigilances
  • les structures de gestion des risques liés aux soins, les autres structures de santé publique et plus particulièrement les centres anti-poisons et de toxicovigilance (CAP-TV)
  • Les CEIP-A
  • les centres de pharmacovigilance vétérinaire
  • les patients, leurs représentants, les associations de patients agréées
  • tout autre usager du système de santé
  • les Agences Régionales de Santé

Les CRPV adressent au déclarant un accusé de réception de sa déclaration qui peut, le cas échéant, comprendre une analyse clinique, biologique, pharmacologique et bibliographique et les suites qui ont été données par le CRPV à l’issue de l’instruction.


Les CRPV transmettent les déclarations valides à l’ANSM via la saisie informatique dans la BNPV selon les procédures en vigueur et alertent le directeur général de l’ANSM en cas d’effets indésirables graves ou de menace pour la santé publique, à travers la détection et la transmission à l’ANSM de signaux à partir de ces cas.

Les CRPV coordonnent et animent des réseaux de professionnels de santé.

Ils participent notamment à la demande de l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, de façon adaptée, à la gestion des éventuelles crises sanitaires ou médiatiques dans le domaine des vigilances.

Les situations d’erreurs médicamenteuses sans effet indésirable portées à la connaissance du CRPV doivent être documentées afin d’identifier une racine produit éventuelle (c’est-à-dire une responsabilité pour tout ou partie du médicament dans les causes potentielles de l’erreur).


✨ Enquête nationale de pharmacovigilance

  • Selon les besoins de l’enquête, il peut être fait appel à des experts ponctuels dont l’avis complémentaire est requis en raison de leur domaine d’expertise et auxquels les règles générales de déontologie et de gestion des conflits d’intérêt s’appliquent également.


  •  L’expert rapporteur collecte les données selon les modalités et procédures préalablement définies avec l’ANSM lors de la réunion préparatoire. Cela inclut les données collectées par l’expert lui-même (recherche bibliographique…).


  • A la demande de l’ANSM, les conclusions de l’enquête peuvent être présentées le cas échéant, pour avis ou pour information, devant l’une de ses instances consultatives.


✨ Communication sur la sécurité d’emploi des médicaments

Les outils de communication comprennent notamment :

  • des documents d’information destinés aux patients et/ou aux professionnels de santé (brochures d’information patients, plaquettes, documents de réduction de risque …) ;
  • une information adressée directement aux professionnels de santé (courrier ou e-mailing) concernés.

Les représentants des professionnels de santé et des associations de patients concernés sont informés si possible avant le grand public pour leur permettre d’anticiper, de relayer l’information et de répondre au mieux aux interrogations de leurs adhérents.


Définitions ajoutées :

  • Autorisation d’accès compassionnel (AAC)
  • Autorisation d’accès précoce (AAP)
  • Cadre de prescription compassionnelle (CPC)
  • Documents source
  • EPI-PHARE
  • Erreur médicamenteuse marquante
  • Événement indésirable grave associé aux soins (EIGS)
  • Événement indésirable associé aux soins (EIS)
  • Expert rapporteur
  • Expert relecteur
  • Intéraction médicamentuse
  • Pharmacodépendence
  • Portail de signalement des événements sanitaires indésirable
  • Pseudonymisation


Quelques définitions :

Documents source : Tout document original en rapport avec un dossier de pharmacovigilance, notamment :

  • rapport de conversation téléphonique ou vidéophonique validé par les parties concernées, courrier initial du notificateur, note interne en provenance du visiteur médical ;
  • fiche de pharmacovigilance (remplie par le notificateur ou une personne chargée de la pharmacovigilance), copies d'examens complémentaires ou de comptes rendus d'hospitalisation;
  • courriers (initial, relance[s], conclusion) ;
  • fiche de transmission, traductions de la fiche ;
  • impressions des saisies informatiques (notices, résumés, tableaux) concernant le dossier.


Erreur médicamentuse : EM (medication error), (error with ADR), (error without harm), (intercepted error), (potential error)

Omission ou réalisation non intentionnelle d’un acte au cours du processus de soins impliquant un médicament, qui peut être à l’origine d’un risque (potential error) oud’un événement indésirable pour le patient. L’erreur médicamenteuse peut être :

  • avérée et entrainer un effet indésirable (error with ADR) ou ne pas entrainer d’effet indésirable (error without harm) ;
  • interceptée avant l'administration au patient (intercepted error).

Un risque d’erreur existe lorsqu’une observation a permis d’identifier un danger potentiel pour le patient (potential error).


Erreur médicamenteuse marquante : EMM (relevant medication error)

Un ou plusieurs cas d'erreurs médicamenteuses pouvant constituer un signal potentiel et portée(s) à la connaissance de l’ANSM.


Pseudonymisation : Traitement de données personnelles réalisé de manière à ce qu'on ne puisse plus attribuer les données relatives à une personne physique sans avoir recours à des informations supplémentaires1. Ces informations supplémentaires doivent être conservées séparément et être soumises à des mesures techniques et organisationnelles afin d’éviter la réidentification des personnes concernées. En pratique la pseudonymisation consiste à remplacer les données directement identifiantes (nom, prénom, etc.) d’un jeu de données par des données indirectement identifiantes (alias, numéro dans un classement, etc.) afin d’en réduire leur sensibilité.

Source : BPPV mai 2022